Le bal était toujours en effervescence, mais pour moi, il n'y avait plus que le rythme sourd de la musique en fond et les regards furtifs des convives. Rien d'autre n'avait réellement d'importance, sauf celle qui marchait à mes côtés, Aelynn. Mon monde entier semblait s'être rétréci à cette simple réalité : elle et moi.
Alors que nous marchions vers un endroit plus isolé, je sentais chaque mouvement d'Aelynn. Son corps encore tendu par la lutte intérieure qu'elle se refusait à perdre. Elle essayait de rester maîtresse de ses émotions, mais je pouvais lire en elle. Je le voyais dans ses yeux, dans sa façon de respirer, dans la manière qu'elle avait de m'effleurer avec ses doigts tremblants quand elle ne pensait pas que je remarquais. Elle se débattait avec quelque chose de bien plus profond qu'elle ne voulait l'admettre.
Je le savais parce que j'avais vu cela des dizaines de fois. Ce combat entre ce que l'esprit considère comme juste et ce que le corps réclame avec un besoin presque primal. Et Aelynn était bien plus proche de céder que ce qu'elle ne pouvait imaginer. C'était là que résidait tout l'intérêt de ce jeu.
Elle pensait encore avoir le contrôle. Qu'elle pouvait se ressaisir, retrouver son équilibre, et continuer à me résister. Mais ce n'était qu'une question de temps. Et je pouvais déjà sentir ce moment se rapprocher, le point où elle lâcherait enfin prise et accepterait ce qu'elle ressentait.
Alors que je l'aidais à se lever pour la conduire vers un endroit plus calme, j'observais chacune de ses réactions avec une précision presque clinique. Le léger tremblement de ses doigts dans les miens, la manière dont elle se crispait subtilement chaque fois que je prononçais son prénom, et surtout, cette lueur dans ses yeux. Cette flamme vacillante qui luttait encore pour rester allumée, malgré l'obscurité que j'infusais dans son monde.
C'était fascinant.
Depuis le début, elle avait résisté de toutes ses forces. Elle s'accrochait à ses croyances, à ses sentiments pour cet idiot d'Adrien. Mais peu à peu, j'avais vu ces barrières s'effriter. Et ce soir, après ce moment passé sur le balcon, je savais que la balance penchait enfin en ma faveur.
"Elle commence à comprendre," pensai-je avec un sourire dissimulé.
Ce n'était pas une simple conquête. Non. Elle était bien plus que cela. Ce n'était pas seulement le plaisir de la dominer qui m'animait, c'était l'idée que je la transformais, que j'étais en train de briser quelque chose en elle pour le remodeler à mon image. Elle devenait mienne, une part de moi qu'elle n'avait pas encore réalisé, mais dont elle ne pourrait plus jamais se défaire.
Je la guidai à travers la foule, mes gestes calculés pour paraître naturels, mesurant chaque interaction avec les convives. Il fallait que tout semble normal, que personne ne puisse percevoir la bataille silencieuse qui se déroulait entre nous. Je pouvais sentir certains regards peser sur nous, peut-être des soupçons ou simplement de la curiosité. Mais cela n'avait pas d'importance. Le monde extérieur n'était qu'un bruit de fond. Le véritable jeu se jouait ici, entre nous deux.
Nous arrivâmes finalement dans un coin plus isolé de la salle, une alcôve discrète, loin des yeux indiscrets. C'était le moment parfait pour intensifier ce que nous avions commencé.
"Assieds-toi," lui dis-je doucement, tout en gardant ce ton impérieux qu'elle connaissait déjà si bien.
Aelynn hésita, mais finit par s'asseoir sur la chaise que je lui désignais. Je pouvais voir la lutte dans son regard, cette hésitation à céder. Elle savait qu'en s'asseyant là, en acceptant de rester seule avec moi, elle abandonnait encore un peu plus de son contrôle.
Je pris place en face d'elle, croisant les bras, la regardant avec cette intensité qui, je le savais, la déstabilisait. J'aimais la voir ainsi. Ce mélange de résistance et de désir qui se lisait sur son visage. Chaque fois qu'elle ouvrait la bouche pour dire quelque chose, je savais qu'elle pesait ses mots, cherchant à ne pas révéler trop de ce qu'elle ressentait vraiment.
"Je sais ce que tu ressens," commençai-je doucement, mon ton empreint de cette fausse douceur que je maîtrisais à la perfection. "Je sais à quel point cela te trouble."
Elle ne répondit pas immédiatement, détournant les yeux vers la foule, comme si elle cherchait une échappatoire. Mais je ne la lâchais pas des yeux. Je voulais qu'elle comprenne qu'il n'y avait aucune échappatoire.
"Regarde-moi, Aelynn."
Ses yeux finirent par revenir vers moi, et je vis cette lueur de défi, cette flamme vacillante qui refusait de s'éteindre complètement.
"Tu peux continuer à lutter si tu veux. Mais tu sais aussi bien que moi que ce n'est qu'une question de temps. Tu te mens à toi-même en pensant que tu peux résister."
Elle secoua la tête, mais je pouvais déjà sentir que ses barrières étaient sur le point de céder. C'était là, juste sous la surface.
"Tu ne veux pas l'admettre, parce que cela te fait peur," continuai-je, ma voix devenant plus grave, plus envoûtante. "Mais tu ne peux pas fuir ce que tu ressens. Pas ici, pas avec moi."
Je me levai lentement, m'approchant d'elle, la dominant de toute ma hauteur. Je pouvais entendre son souffle devenir plus court, ses doigts se crispant sur le bord de sa robe.
Je me penchai vers elle, mes lèvres effleurant à peine son oreille. "Tu me veux, Aelynn. Plus que tu ne veux te l'admettre. Et tu vas céder. Pas parce que je te l'impose, mais parce que c'est ce que tu désires au plus profond de toi."
Je la sentis frémir sous mes mots, son corps réagissant malgré elle. C'était ça que j'aimais le plus. Ce moment où l'esprit et le corps n'étaient plus en phase, où le désir l'emportait sur la raison.
Je me redressai, reculant légèrement pour la laisser respirer. "Je ne te forcerai pas, Aelynn. Mais souviens-toi d'une chose : tu n'es jamais vraiment à l'abri de toi-même."
Je vis la lutte dans ses yeux, ce moment où elle pesait ce que je venais de dire, cherchant une échappatoire, une raison de ne pas succomber. Mais je savais que la bataille était presque terminée. Il ne restait plus qu'un dernier pas à franchir, et ce pas, elle le ferait d'elle-même.
Elle me regarda, ses lèvres tremblant légèrement. "Je ne suis pas à toi, Marcus," murmura-t-elle finalement, sa voix à peine audible.
Je souris, cette fois sans moquerie. "Pas encore."