La fine poussière de l'arène soulevée par l'onde de choc, retombait lentement en un épais nuage nébulaire. De ce fait, le brouillard qu'elle avait produit révélait en se dissipant lentement le visage du combattant d'acier dont le regard de glace ne pouvait que désarmait la fureur du guerrier écarlate.
Pourtant, malgré cet air sévère, la volonté de l'homme aux dorure vermillon restait inébranlable. Nul ne savait vraiment pourquoi un mage était présent dans l'arène, mais tous semblaient comprendre les raisons de sa colère. Seul et désormais encerclé, tout le forcer à agir. Alors l'homme prit le temps d'un soupir puis comme réponse, il chanta quelques paroles, ultime avertissement avant de prendre une posture guerrière. Suivant ses mouvements, les flammes dansaient entre ses mains, ils ne faisaient qu'un avec le feu.
Aïma fut prise de panique, elle supplia le mage. Il n'en fit rien pourtant, car à peine avait-elle eu le temps de se relever que l'être de feu commencer déjà à embraser l'arène. Il ferma le poing et tendit son bras d'un geste aussi vif qu'adroit. Les flammes laissaient alors derrière elle une vive traînée écarlate persistante dans l'air comme la rime d'un Alexandrin et lorsque sa danse prit fin. Telles des flèches, les flammes jaillirent vers l'être d'acier. En un instant, pas même le temps d'une seconde, les projectiles furent à distance d'impact. Heureusement, cependant, le mage avait manqué sa cible. Les traits de lumière que formaient les flèches ardentes s'étaient alors écrasés sur le mur de l'arène avec une telle force qu'elles en avaient percé l'édifice.
L'ego, pourtant, ne donna aucun signe de réaction, si sa tête ne s'était pas penchée comme pour mieux observer le spectacle, on aurait pu croire qu'il s'était figé de peur sur place.
Le mage fut alors d'autant plus en colère. Fronçant les sourcils, son regard semblait plus sévère que jamais. Quelle arrogance se disait-il et ses flammes semblaient ressentir sa colère, car elles rugissaient, sifflant le chant de la mort si bien qu'il en devenait difficile de respirer.
Pensées du robot : "absorption d'énergie thermique"
L'être de métal semblait paralysé, tiraillé par un champ de possible insoluble et pourtant, comme toujours, pousser à agir par son système pseudo-morale, mais que pouvait-il faire ? Il n'en avait pas la réponse. Ce pourquoi désespérer, il tenta, armé uniquement de son incapacité à communiquer, d'exprimer son besoin :
Dit-il. Ses mots était encore certe maladroit mais peut être, l'espérait-il, suffisamment clair pour que le mage comprenne. Pourtant celui-ci ce mit à hurler :
"Otan ek ? Magnem ek tere tars otan em ?"
Ego venait, à son insu, de lui demander de se rendre, imitant les gardes frontaliers dont il avait compris que la parole signifiait de marquer un arrêt. Ô combien désastreuses les conséquences de son erreur. Le mage ne prenait plus même le temps de parader avant de bombarder sa cible, il ne s'arrêtait plus, touché dans son orgueil, il voulait détruire sa cible, la broyait, l'humilié.
Ego pouvait au moins se satisfaire d'une chose. La douce mais étouffante chaleur des flammes réchauffait simplement son système, en un mot, c'était pour lui plutôt agréable. L'homme s'épuisait en vain, mais plus les flammes valsaient et plus les quelques particules d'air respirable flottant dans l'arène se raréfiait, c'était là le carburant de la fournaise comme l'ultime souffle de vie des êtres de chair. Ce pourquoi Aïma voyait sa fièvre monter et son rythme cardiaque vaciller. Sa respiration se saccadait, elle toussait. Ego comprenait cela, il le ressentait à sa manière. Or, sa simple inaction ne résoudrait en rien la situation, ni pour lui, ni pour tous ceux qui l'entouraient. Pourtant, que pouvait-il faire ?
Les spectateurs braillards commençaient à s'alarmer, certains même se cachaient le visage par peur de découvrir les pires horreurs une fois les flammes éteintes. Ils avaient peur. Le match de lutte n'en était plus un depuis maintenant longtemps et ils ne savaient que trop bien que personne n'arrêterait le guerrier flamboyant. Ni les combattants, ni les autorités dont le mage faisait sûrement partie. Dans sa rage infernale, il semblait d'ailleurs lui-même avoir perdu le contrôle de ses propres armes, il était devenu le feu et ainsi, la situation s'empirait. Tant et si bien que l'audience elle-même commençait à tousser en respirant l'épaisse fumée noirâtre qui sillonnait le long du mur de l'arène.
Plus la machine attendait et plus le problème se complexifiait, jusqu'à en devenir insoluble. Peu importe la manière dont il modélisait le problème, peu importe le nombre de calcul qu'il résolvait, il finissait toujours dans la même impasse.
Ô combien frustrante l'idée qu'il ne pouvait contrôler un environnement agissant à ses dépends.
Ô combien désesprérante l'idée que toute action déclencherait une chaîne de conséquences jamais favorable.
Ô combien décevante l'idée qu'il ne pourrait qu'être le spectateur d'une chute inévitable et pire encore que son inaction par nature aurait des conséquences plus grave encore que tout ce qu'il pouvait envisager.
C'était la leçon onéreuse que le mage lui donnait, une leçon dont l'impact était bien plus puissant que n'importe quel projectile que n'importe qu'elle arme. Elle était pour Ego la démonstration de ses propres failles, de son imperfection, la preuve qu'il était incomplet.
pensée du robot : "Test valide, système moral mit à jour."
Narth tenta de profiter de la confusion. Lui non plus n'avait pas dit son dernier mot. Alors il prit une dernière inspiration et se redressa prudemment. Il espérait que le manque d'attention du mage lui permettrait de se faufiler dans son dos et ceux si possible avant qu'il ne finisse lui-même en cendre. Alors il prit son élan. S'il allait suffisamment vite, s'il perçait les défenses du mage, alors peut-être qu'il pourrait s'en sortir. Voilà la seule chose qu'il avait en tête désormais. Une volonté de vivre qui le poussait à se surpasser. Une volonté si puissante qu'elle l'avait poussé à activer la magie des runes gravé dans son corps. Cela faisait si longtemps qu'ils ne les avaient pas utilisées. Si longtemps que les cicatrices laissées par leur empreinte, c'était refermé les rendant presque imperceptibles. La douleur était vive, mais sa force en était décuplé. L'ultime ressort des Templiers d'Hagalaz, une magie contrôlée imprimé par les nains tels des circuits sur des machines. Seul un fou irait jusque-là, seul un fou contaminerait son propre corps afin de devenir plus fort.
Pensé du robot : "Action impossible"
L'homme de feu ne remarquait pas le danger. Il était bien trop occupé à se charger de celui de métal qui se dressait toujours face à lui. Or, il n'en fallait pas plus pour permettre à Narth de s'approcher. Il ne savait pas si Ego tenait encore debout et comment d'ailleurs le pourrait-il ? Mais il savait qu'il ne lui faudrait qu'un seul coup. Un seul afin d'éteindre le foyer de tout leur problème.
Pensé du robot : "Action impossible"
Lorsque Narth fut enfin à porter, il enclencha le mouvement utilisant toute la force de son corps comme Aïma le lui avait rudement appris et au moment fatidique. Alors que son poing devait entrer en contact avec sa cible, et ce, faisant mettre un terme au combat. Narth fut si lent, tant l'épuisement du combat qu'il avait était sévère, que le mage put esquiver aisément. Armé alors d'un regard empli de dédain, le guerrier attrapa Narth par le col. Il n'eut aucune difficulté, à d'un simple geste le plaquer au sol tant le titan du nord était affaibli. L'homme pourpre se prépara alors à l'achever lorsque soudain ses pieds quittèrent le sol. En ce tournant, il vit de nouveau ce regard. Un regard dépourvu de toute émotion, un regard trempé dans un acier froid et glacial. Un regard dont il ne pouvait lire l'intention, un regard qui l'emplissait de terreur.
Un crac résonna dans toute l'arène puis un suivant. Les bras du mage pendaient dans le vide inerte, délogeaient de leurs gonds. L'être de feu ne pouvait plus danser et ainsi les flammes s'assoupirent lentement, calmement, libérées de l'emprise soumise par la fureur du guerrier.