บท 3: Anankhguè, la Cité des Ombres
Lars s'éveilla en sursaut, la sueur collant à sa peau. Il était de retour dans la forêt, mais quelque chose était différent. Un poids écrasant pesait sur son esprit, une urgence palpable dans l'air, une sensation qu'il n'arriverait jamais à échapper à ce lieu. Il était encore là, dans cette dimension parallèle aux lois du monde des hommes, là où les ombres se nourrissent de la faiblesse et de la peur.
Les Iyeh n'étaient pas loin, il le sentait. Mais cette fois-ci, ils n'étaient pas seuls.
Il se leva en titubant. Le sol, dur et rugueux sous ses pieds, semblait le retenir, comme une invitation à rester, à se laisser absorber par l'obscurité. Mais Lars n'avait pas l'intention de se laisser faire. Il serra les poings et regarda autour de lui.
Anankhguè.
Ce nom résonnait dans sa tête comme une malédiction. Un mot qu'il avait entendu murmurer par les esprits pendant ses cauchemars. Ce n'était pas un simple lieu. C'était une prison, un point de convergence entre les mondes visibles et invisibles. Un lieu où les âmes perdues se retrouvaient piégées, où les démons et les esprits se côtoyaient dans un équilibre fragile, toujours prêt à se briser. Anankhguè n'était pas un endroit qu'on trouvait par hasard. C'était le cœur même du chaos, le carrefour où se croisaient toutes les destinées, où l'obscurité tordait la réalité.
Lars n'était pas censé être ici. Il avait pris un chemin, fait un choix, un choix qui l'avait mené droit vers ce lieu maudit. Mais il n'avait pas de regret. Pas encore. Les regrets étaient pour les âmes faibles. Il n'était pas là pour être une victime. Il était là pour apprendre, pour grandir, et pour prendre ce qui lui revenait de droit : la maîtrise des ombres.
Il se tourna vers le brouillard dense qui l'entourait. Les arbres étaient immenses, leurs troncs aussi noirs que la nuit, leurs racines serpentant hors du sol comme des bras cherchant à l'attraper. De l'autre côté de la brume, il apercevait une lueur incandescente, comme un feu que l'on allumerait pour guider les âmes égarées. Mais il savait que ce n'était pas une lumière de salut. C'était un piège, un leurre des esprits.
Anankhguè n'était pas un endroit de lumière.
Il avança. Le sol sous ses pieds craquait et gémissait à chaque pas, comme si la terre elle-même se sentait trahie. Plus il marchait, plus il sentait l'atmosphère se charger de malice. Les voix s'étaient tues. Il n'y avait plus que le bruit de ses pas et le souffle de son propre corps. Mais il savait qu'il n'était pas seul. Il le sentait dans la moelle de ses os, une présence omniprésente, une vigilance animale prête à frapper.
Puis, soudainement, il s'arrêta. Un frisson parcourut son échine. Devant lui, une silhouette apparut dans le brouillard, presque invisible, une ombre parmi les ombres. Il la scruta, ses yeux de prédateur guettant le moindre mouvement. La silhouette s'éclaircit, et bientôt, une forme humanoïde se dessina, l'air étrange et irréel. Elle portait un long manteau sombre, presque fusionnant avec les ténèbres qui l'entouraient. Ses yeux étaient aussi noirs que l'obscurité elle-même, une profondeur insondable qui semblait lire dans l'âme de Lars.
"Tu es venu, fils du chaos," dit-elle d'une voix sourde et froide, comme une brise glacée qui hurlait dans le vent.
Lars garda son regard fixé sur la silhouette. "Je suis venu là où on m'a envoyé," répondit-il d'un ton sec, son esprit déjà forgé dans la résistance. Il n'avait pas peur de cette présence. Il n'avait pas peur de ce qui l'attendait dans ce lieu. L'ombre qui se tenait devant lui en savait plus que ce qu'elle laissait paraître, mais il n'avait pas l'intention de se laisser impressionner.
La silhouette se mit à rire, un rire grave, presque inhumain. "Tu penses vraiment que tu es maître de ton destin ? Que tu peux te tenir ici et défier le pouvoir des ombres ?"
Lars serra les poings, la haine bouillonnant en lui, mais il resta calme. "Je suis ce que je suis. Les ombres ne sont pas mes maîtres. Elles ne sont que des outils. Des armes."
"Tu crois ça, hein ?" La silhouette s'avança, et Lars put sentir l'air se charger de tension. "Tu n'es qu'un enfant perdu. Une âme errante parmi tant d'autres. Et Anankhguè… Anankhguè n'est pas un endroit où l'on défie les lois. Ce n'est pas un lieu que l'on contrôle. C'est un endroit où l'on est transformé. Là où l'âme perd son identité."
Lars rit, un rire sec. "Je ne suis pas mon âme. Et je n'ai pas d'identité à perdre. Je suis ce que le monde a fait de moi. Si ce lieu veut me transformer, qu'il essaye. Je vais en sortir, et cette fois, je prendrai ce qui m'appartient."
La silhouette se tut un instant, comme si les mots de Lars avaient eu un impact plus profond qu'il n'avait voulu l'admettre. "Tu n'as pas compris, jeune Lars," murmura-t-elle alors que son corps se dissipait lentement dans la brume. "Anankhguè ne te laissera pas partir. Pas sans payer le prix."
Les ombres s'étaient refermées autour de lui. Le lieu n'était pas simplement une prison ; c'était une épreuve. Un test. Mais un test pour quoi, exactement ? Lars n'en savait rien, et il n'avait que faire des raisons ou des justifications. Il se fichait du prix à payer. Il avait un seul objectif : se libérer des chaînes invisibles qui l'avaient toujours retenu.
Anankhguè allait lui offrir un pouvoir qu'il n'aurait jamais imaginé. Mais à quel prix ? Il n'était pas sûr de vouloir le savoir.
À suivre...
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