บท 24: Ylesse - Mensonges.
Si le trajet avait pris plusieurs heures pour Ewan, Pavas et Fusain, le trajet de Wynblow avait été bien plus direct en prenant la voie des airs.
En près d'une petite heure, elle avait déjà atteint sa destination, le mont Larshen.
En vérité, Larshen était plus une chaîne de montagnes, plutôt qu'une seule grande montagne solitaire plantée au milieu du paysage. Étant également située plus au sud que Borh et le village où Ewan avait croisé sa route, le mont Larshen était déjà envahi par la verdure et une dense végétation que le froid ne pouvait atteindre en ces contrées bien plus exposées au soleil.
Les animaux étaient également beaucoup plus nombreux que dans la montagne où elle avait passé tout ce temps à se cacher, et s'enfuyaient en masse dès qu'elle survolait un flanc de montagne. Un peu comme des fourmis dont on aurait détruit la maison, se dispersant dans toutes les directions de façon totalement aléatoire.
Toutefois, c'était justement à cause de cette abondance d'arbres et d'arbustes que Wynblow dût redoubler d'efforts pour trouver un endroit où se poser.
Même si elle était moins grande que certains de ses congénères, l'envergure de ses ailes l'empêchait de se faufiler entre les arbres, et il lui fallut voler en cercle plusieurs fois avant d'enfin trouver un flanc de montagne quelque peu dégagé.
Le trajet avant déjà fatigué les muscles de ses ailes, et sa blessure à la patte n'allait certainement pas arranger les choses. Elle ne savait pas non plus exactement quand ni où elle retrouverait le jeune homme, et pendant tout le trajet, elle avait été possédée par une anxiété grandissante.
Et si… Il lui avait menti ?
Ce soupçon n'avait pas quitté son immense cœur, la faisant craindre que l'humain s'était peut-être joué d'elle et l'avait abandonné.
Jusqu'à présent, elle n'avait jamais fait confiance à personne, si ce n'est…
Elle repensa à l'homme de son rêve – probablement un souvenir lointain ayant refait surface – et eut mal à la tête.
Pourquoi… Ne se souvenait-elle de rien ?
Elle avait bien dit au jeune chasseur ne pas se souvenir de sa supposée enfance, mais c'était en vérité bien pire.
La jeune dragonnelle ne se souvenait de rien, depuis qu'elle s'était réveillée il y a un an de cela. Son souvenir le plus ancien remontait à une année en arrière, alors qu'elle avait émergé d'une caverne vers un monde dont elle ignorait tout.
Non, à y réfléchir, elle ignorait presque tout, sauf une chose bien précise : elle avait l'irrépressible envie de se rendre dans le nord. De se rendre à Valgheist.
Wynblow en était sûre, à présent. C'était sûrement le nom de l'endroit où elle devait se rendre. L'endroit qui possédait toutes les réponses à ses questions, et possiblement la clé de son passé oublié.
Pourtant, cette information la rendait également anxieuse. Pourquoi est-ce que ce mot en particulier semblait-il si familier et à la fois si menaçant ?
S'allongeant dans les hautes herbes, elle observa silencieusement les nuées d'oiseaux parcourant le ciel, les étranges bancs de moineaux naviguant entre les cimes des arbres.
Si tout pouvait être aussi simple que de voler sans soucis à longueur de temps…
Par peur qu'il ne l'abandonne, elle avait déjà distordu la réalité comme elle la souhaitait.
Une dizaine d'années passées dans le comté de Kells ? Quelle blague.
Un autre dragon qu'elle avait côtoyé un moment ? Ils n'avaient vécu que quelques mois ensemble, avant que le vieux dragon ne périsse.
Certes, elle avait appris quelques rares mots de langue draconique, et elle connaissait déjà le vieux langage humain sans l'avoir appris.
Wynblow. Ce nom lui était également plus que familier, lui appartenant entièrement.
Au fond, elle n'avait pas entièrement déblatéré des mensonges, mais elle était déjà allée trop loin.
Elle avait déjà trop menti sur sa propre situation, alors qu'est-ce qui lui disait que le jeune chasseur ne lui avait pas aussi menti ?
Toujours distraite, elle repéra alors un oiseau de proie plonger vers le nuage vivant composé d'une centaine de moineaux, le rapace attrapant en plein vol entre ses serres un des petits oiseaux pour en faire son repas.
Les choses n'étaient jamais simples, quelle que soit la situation dans laquelle on se trouvait.
Tôt ou tard, elle devrait probablement lui dire la vérité. Si, toutefois, il tenait parole et venait la retrouver ici.
Même avec un immense cœur ardent et renforcé comme le sien, elle ne pouvait s'empêcher de se sentir minuscule, livrée à elle-même.
Sentant le vent se faufiler entre les pointes de ses écailles, elle entendit un léger sifflement – un bruissement, peut-être ? - se propager tout le long de son corps. Ses écailles continuèrent de produire ce son étrange jusqu'à ce que le souffle de vent prenne une autre direction, allant s'engouffrer sous les arbres environnant.
Maintenant qu'elle y pensait, ça faisait un moment qu'elle n'avait pas profité aussi innocemment de la chaleur du soleil. Être un dragon était loin de représenter une longue série d'avantages, surtout dans un monde où l'espèce était chassée par presque toutes les civilisations pensantes et suffisamment fortes pour s'en prendre à des Salamander. Même en faisant partie d'une des races les plus fortes et les plus terrifiantes du continent, rien n'empêchait de tomber comme proie aux mains d'humanoïdes un peu trop zélés.
Dans ce cas… Pourquoi lui avait-elle fait confiance, à lui ?
En y réfléchissant, ça n'avait pas vraiment de sens.
Certes, ils avaient eu une discussion plutôt amicale, au lieu de directement chercher à s'entre-tuer. Elle avait eu une étrange sensation, quand ses yeux s'étaient posés sur ce jeune homme. Presque comme si…
Le craquement soudain de plusieurs branches lui fit immédiatement relever la tête, en état d'alerte.
Quelqu'un était très proche de sa position, elle le sentait.
L'odeur d'un être humain.
Se pouvait-il que quelqu'un l'ait aperçue en train de voler dans le ciel, et l'ai suivie jusqu'ici ? Et dans ce cas, devait-elle à nouveau s'envoler pour aller chercher une autre cachette ?
Sa grande tête pleine de pics et de cornes se tourna dans tous les sens, comme une sorte de tour de guet émergeant des herbes hautes ; à l'affût de la moindre chose entrant dans son champ de vision.
Tout à coup, elle entendit un bruit de pierres et de sable en train de dégringoler, comme si quelqu'un avait glissé dans une pente. Dirigeant son regard vert vers la source du bruit, elle vit alors entre plusieurs fourrés une sorte de gros panier dépasser.
Puis, une voix pleine de détresse s'éleva alors des buissons.
« Ah… Mon dos… »
Bon sang, c'était bien un humain. Elle devait partir le plus rapidement possible d'ici.
Se relevant brusquement en ignorant la douleur qui foudroyait sa patte, elle s'apprêtait déjà à prendre son envol, quand la voix s'exprima à nouveau.
« À… À l'aide… Il y a quelqu'un ? »
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AreeSensei
AreeSensei Nous retournons momentanément du côté de Wynblow, tandis qu’Ewan continue d’en apprendre plus sur la situation qui accapare Carciem.
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