La forêt était devenue un lieu de cauchemar. Les arbres, habituellement majestueux et protecteurs, étaient maintenant transformés en supports macabres. Des corps pendus, des membres cloués aux troncs, des viscères suspendus comme des guirlandes morbides. L'air était saturé de l'odeur de la mort, un mélange nauséabond de chair en décomposition et de sang coagulé. Le chef des chasseurs avait orchestré ce spectacle d'horreur avec une minutie glaçante, laissant des survivants choisis pour être les messagers de sa terreur.
Un jeune homme, couvert de sang et tremblant, émergea de la forêt pour retrouver Aniaba et son groupe. Son visage était marqué par la peur, ses mots entrecoupés de sanglots.
— Ils… ils ont dit… ils ont dit que leur prochaine cible est… le village de la colline !
Aniaba, les poings serrés, ferma les yeux. Il savait que c'était un piège. Chaque fibre de son être lui criait de ne pas tomber dans cette provocation. Mais les cris de ses propres souvenirs, mêlés aux visions d'horreur que lui avait montré le jeune homme, ravivèrent la rage qu'il tentait de contenir.
Nyala s'approcha de lui, posant une main ferme sur son bras.
— Aniaba, c'est ce qu'ils veulent. Tu ne peux pas…
Il la coupa d'un regard glaçant.
— Ils doivent payer pour cela. Tous.
Il se leva, sa silhouette imposante projetant une ombre intimidante sur les villageois qui regardaient en silence. Sans attendre d'autres discussions, il se mit en marche vers la colline, laissant les autres derrière lui.
Le village de la colline était en flammes lorsqu'Aniaba arriva. Les chasseurs étaient encore là, ricanant et buvant au milieu des corps éparpillés. L'un d'eux jouait nonchalamment avec une mèche de cheveux coupée, tandis qu'un autre traînait un corps inerte vers une pile de cadavres. C'était un spectacle qui aurait brisé n'importe quel homme. Mais pour Aniaba, c'était la goutte d'eau.
La rage qu'il avait réprimée jusqu'ici explosa avec une violence inimaginable. Il se jeta dans le campement avec une vitesse fulgurante, ses mouvements flous pour les chasseurs pris au dépourvu. Le premier ne vit qu'une ombre avant que sa gorge ne soit tranchée. Le second tenta de lever son mousquet, mais Aniaba lui brisa le bras d'un coup sec avant de l'étrangler avec une brutalité effrayante.
Plus il tuait, plus il se sentait puissant. Sa vitesse et sa force augmentaient, chaque mouvement semblant défié les lois de la nature. Les blessures qu'il subissait se refermaient sous les yeux horrifiés des chasseurs. Une lame plongea dans son flanc, mais il l'arracha comme si ce n'était rien, avant de transpercer son assaillant avec la même arme.
Ses ennemis, pourtant endurcis, commencèrent à reculer, terrifiés par cet homme qui semblait être devenu un monstre incarné. Aniaba ne montrait aucune pitié. Chaque coup était calculé pour infliger un maximum de souffrance. Il broyait des os, arrachait des membres, laissant une traînée de carnage derrière lui.
Le chef des chasseurs, qui observait la scène de loin, comprit qu'il ne pouvait rien faire pour sauver ses hommes. Il recula lentement, puis tourna les talons pour fuir, le regard sombre mais déterminé. Ce n'était pas une retraite définitive. Pour lui, Aniaba était devenu sa baleine blanche, son némésis. Il jura silencieusement qu'il trouverait un moyen de le vaincre, quel qu'en soit le prix.
Lorsque la rage d'Aniaba s'apaisa enfin, il se retrouva seul au milieu d'un champ de cadavres. Le sol était imbibé de sang, les flammes vacillaient autour de lui. Son souffle était rauque, ses mains tremblantes. Mais ce n'était pas de la fatigue. C'était le poids de ce qu'il était devenu.
Nyala arriva peu après, les yeux remplis de tristesse. Elle posa une main sur son épaule, mais Aniaba ne réagit pas.
— Ils te transforment en ce qu'ils veulent que tu sois, murmura-t-elle. Un monstre. Mais tu peux encore choisir.
Aniaba releva lentement la tête, ses yeux rencontrant les siens.
— Et si le monstre était la seule chose capable de les arrêter ?
Nyala ne répondit pas. Elle savait que la bataille d'Aniaba n'était pas seulement contre ses ennemis, mais contre lui-même.