Aniaba avait suivi l'homme élégant depuis plusieurs jours, s'immergeant dans les ruelles animées et les venelles sombres de Port-au-Prince. Il avait observé chaque détail : les lieux que l'homme fréquentait, les personnes qu'il rencontrait, et les heures à laquelle il disparaissait dans l'ombre. Il était patient, calculateur, laissant son instinct et sa formation de prince-guerrier le guider. Lorsqu'il fut certain de la routine de sa cible, Aniaba élabora son plan.
La nuit choisie, il se tenait caché dans une ruelle étroite, les ombres étant ses alliées. Sa cible, comme à son habitude, marchait seul vers une maison discrète située à la lisière de la ville. Mais ce que ni Aniaba ni les habitants de Port-au-Prince ne savaient, c'était que cet homme n'était pas une simple figure de la ville : il était un expert en contre-espionnage, un manipulateur aguerri qui avait déjà remarqué Aniaba.
Lorsque l'heure fut venue, Aniaba surgit de sa cachette, préparé à isoler sa cible. Mais à cet instant, il sentit un frisson dans l'air. Avant qu'il ne puisse réagir, des ombres se mouvèrent autour de lui. Un groupe d'hommes, armés de couteaux et de sabres, émergea des coins sombres. L'homme élégant était toujours là, mais il ne semblait nullement inquiété.
— Vous avez fait preuve de persévérance, murmura-t-il avec un sourire froid. Mais il semble que vous soyez tombé dans votre propre piège.
Aniaba, les muscles tendus, ne répondit pas. La rage montait en lui comme une vague, alimentée par la présence de ces hommes qui l'encerclaient. Il les observa un par un, évaluant leurs forces et leurs faiblesses. Puis il laissa son pouvoir prendre le dessus.
Ce qui suivit fut une danse de sang et de mort. Aniaba était un ouragan de violence, frappant avec une force inhumaine et une rapidité fulgurante. Ses ennemis tombaient un par un, brisés, écrasés, mutilés. Il était devenu une arme vivante, guidée par une rage presque animale. Mais dans ce carnage, il perdit de vue l'homme qu'il avait traqué.
Lorsqu'enfin le silence retomba, Aniaba se tenait seul au milieu des cadavres. Ses mains étaient trempées de sang, et son souffle était court. Mais en baissant les yeux, il vit le corps de sa cible, étendu parmi les morts. Une profonde entaille traversait son torse, et ses yeux éteints fixaient le ciel sans vie.
— Non… murmura Aniaba, réalisant son erreur. Dans sa fureur, il avait tué l'homme qu'il souhaitait interroger.
Il se souvint alors des paroles du Baron Samedi, des promesses murmurées dans l'obscurité. Il n'était pas encore certain de ce dont il était capable, mais il n'avait pas le choix. S'agenouillant près du corps de l'homme, il posa une main tremblante sur son front.
— Parlez-moi… dit-il à voix basse, ses mots étant presque une prière. Parlez-moi, même dans la mort.
Rien ne se produisit au début. Puis, lentement, les yeux du mort s'ouvrirent. Un frisson glacé parcourut Aniaba. Les pupilles voilées fixèrent le vide, mais une voix rauque et distante s'éleva.
— Que veux-tu savoir, prince des morts ?
Aniaba réprima un tremblement, rassemblant son courage.
— Qui t'a envoyé ? Quels secrets gardes-tu ?
Le mort répondit, mais ses mots étaient cryptiques, fragmentés, comme si une force obscure s'efforçait de limiter ce qu'il pouvait révéler.
— Montclair… un ordre… d'éradiquer… les menaces…
Aniaba serra les poings, cherchant à approfondir ses questions.
— Quels hommes ? Quels plans ?
Mais la voix s'affaiblissait, et le corps du mort se raidit avant de retomber inerte. Le silence revint, pesant. Aniaba resta agenouillé, le regard fixant le vide. Cette expérience l'avait laissé avec plus de questions que de réponses, mais elle avait également révélé une vérité terrifiante : ses pouvoirs étaient bien plus sombres qu'il ne l'avait imaginé.
Il se releva finalement, nettoyant ses mains sur le tissu d'un cadavre. Sa mission venait de prendre une tournure plus complexe, et Montclair devenait une menace encore plus pressante. Mais pour le moment, il devait se retirer, digérer ce qu'il avait appris et se préparer pour l'affrontement à venir.