La main de Géandre se resserra lentement sur son épée tandis qu'il se ruait vers l'inconnu masqué qui attaquait Valshesia. Cependant, la jeune femme ne resta pas immobile à attendre qu'on lui vienne en aide, et récupérant une petite dague rangée dans un de ses gantelets de protection, elle la planta dans le bras qui lui serrait la gorge.
La lame s'enfonça dans la chair, sans pour autant surprendre son attaquant. Ce dernier la repoussa en lui donnant un coup de pied dans l'abdomen, et tandis qu'il se ruait vers elle avec son épée sortie de son fourreau, la jeune lancière roula sur le sol. Géandre s'interposa juste à temps pour lui épargner une lame d'épée abattue sur elle, deux épées entrant en contact et grinçant l'une contre l'autre.
Valshesia en profita pour se redresser et rappeler avec son sort de téléportation sa lance dans ses mains. Géandre s'écarta sur la droite, et elle brandit l'arme en avant vers l'espace qu'il avait libéré ; forçant l'ennemi à bondir en arrière pour éviter la lance projetée vers lui. Son épée fit un arc horizontal, balayant l'arme de Géandre et celle de Valshesia, et il brandit tout à coup sa main libre vers eux. Un éclat de lumière magique apparut brièvement, et les deux chasseurs se retrouvèrent projetés à une dizaine de mètres de là ; repoussés par une force invisible.
Ils tombèrent lourdement au sol, et avant qu'ils n'aient le temps de se relever, l'ennemi masqué courut vers eux.
L'inconnu s'apprêtait encore une fois à abattre son épée sur eux, quand un mur de terre surgit soudainement du sol entre lui et les deux chasseurs.
À quelques mètres de là, la femme alchimiste avait juste eu le temps de le créer pour s'interposer ; ses deux mains tendues en avant vers la zone du terrain qu'elle modifiait. Son intervention ne passa pas inaperçue, et l'ennemi masqué brandit vers elle sa paume de main gauche : la jeune femme se retrouva elle aussi balayée sur le côté par des dalles hexagonales invisibles qui ne se révélèrent que très brièvement au contact de son corps. Elle était à présent la nouvelle cible de cet ennemi isolé, mais avant qu'il ne puisse l'atteindre, Thervis tira une ligne de plusieurs flèches juste devant l'alchimiste pour dresser une barrière magique entre elle et son assaillant tandis que l'épéiste, Redrain, s'occupait de la tirer par le bras pour l'éloigner de la zone de combat.
La lance de Valshesia vola dans les airs en direction du dos de leur agresseur, mais ce dernier s'écarta juste à temps pour se faire entailler le flanc gauche. L'arme se volatilisa alors pour réapparaître dans la main de la jeune femme.
« Attention, ce type semble posséder une magie de rempart, » avertit à voix haute Géandre.
« Les magies de rempart ne sont pas censées être mobiles comme ça, » le contredit Thervis, en criant depuis l'autre côté.
L'expert en combat à distance avait raison. Une magie de rempart, qui permettait de créer une barrière magique, ne pouvait être établie qu'en un point, sans possibilité de la bouger une fois dressée. La ligne de flèches de Thervis, comme les murs des cités blindées, en étaient un parfait exemple : ils demeuraient à une seule position, celle qui leur avait été attribuée dès le départ.
Alors si ce type pouvait faire bouger sa barrière magique comme ça…
« Ce serait un artefact ? » Dit-il.
Valshesia le regarda et hocha de la tête.
C'était la seule explication possible à ce cas de figure ; qui rendait également cet ennemi tout d'un coup plus dangereux.
« L'ennemi possède un artefact ! Changement de stratégie ! » S'exclama Géandre. « Dispersion ! »
S'ils étaient trop près les uns des autres, ils risquaient d'être tous balayés d'un coup par la barrière magique invisible ; et se doutant que l'arme possédait tout de même un champ d'action prédéfini, se séparer les uns des autres tout en maintenant leurs distances avec l'ennemi était la meilleure chose à faire.
Immédiatement, chacun recula de plusieurs pas et se sépara des autres ; Valshesia et Géandre mettant une vingtaine de mètres entre eux.
Les cinq chasseurs encore debout formaient à présent un immense cercle autour de leur ennemi, prêts à passer à l'action au moindre geste de l'homme masqué.
Ce dernier resta immobile, toisant ses proies d'un regard bleu ciel que personne ne pouvait apercevoir à cause de son masque lisse et opaque. La blessure sur son flanc gauche continuait de saigner, mais la douleur ne le dérangeait pas. Il était trop occupé à estimer la menace que pouvaient représenter ses opposants, et voyant que leur tank était allongé et inconscient, Androanni comprit que ces chasseurs ne poseraient pas le moindre problème.
Il leva un bras vers Géandre, qu'il reconnaissait comme leur meneur, et le pointa du doigt. Une cavalcade résonna dans la clairière, le Béhémoth s'étant relevé pendant que les chasseurs ne lui prêtaient pas attention, et fonçant tout droit sur le chasseur aux longs cheveux coiffés en tresse.
Les yeux écarquillés, Géandre s'écarta de justesse en sautant sur le côté, et pétrifié, leva un regard tremblant vers l'homme masqué qui le surplombait déjà avec la pointe de son épée plaquée contre son torse.
Puis, toujours en plaquant Géandre au sol avec la pointe de son épée, l'homme masqué pointa du doigt Valshesia. Le Béhémoth émit un rugissement, et reprenant sa folle course, dirigea ses deux grosses cornes vers la femme à la lance.
S'il n'avait pas imaginé tout ça, la situation était pire que tout ce que Géandre pouvait imaginer.
Ce type… Contrôlait le Béhémoth.
Est-ce que cela voulait aussi dire que c'était lui qui avait ordonné au monstre de déchiqueter l'autre groupe de chasseurs ?
Cependant, même en observant le comportement de la créature qui se lançait à la poursuite des autres chasseurs, et de l'homme qui le tenait captif dans un silence complet, il dût se rendre à l'évidence.
Ça n'avait pas l'air d'être une magie d'invocation associée à du dressage, comme ce que Géandre faisait lui-même. Aucun ordre n'était donné, et la créature semblait totalement déchaînée. Enragée, même.
Ce n'était pas un contrôle qui faisait appel à de la coopération entre maître et bête, mais à une soumission pure et simple sous une force supérieure. Une hypnose puissante, qui se reflétait dans les yeux brillants mais vides de toute volonté propre du Béhémoth.
La pointe de l'épée pressa plus fort sur sa cuirasse de poitrine, et relevant les yeux vers l'homme masqué, Géandre eut le souffle coupé par l'angoisse.
Même s'il ne pouvait pas voir le visage et le regard de l'homme qui se penchait lentement vers lui, Géandre était pétrifié, persuadé que l'individu masqué le regardait droit dans les yeux avec intensité.
Encore quelques centimètres, et l'homme masqué s'était totalement accroupi, son visage extrêmement proche de celui du dresseur de monstres.
Une main gantée vint saisir le bas du visage de Géandre, serrant ses deux joues et son menton, et un frisson glacial parcourut tout son corps.
Sans qu'il puisse l'expliquer, l'homme avait amené avec lui une vague de froid ; comme si son corps irradiait d'une température extrêmement basse à la manière d'un bloc de glace posé en pleine chaleur.
Du coin de l'œil, le dresseur de monstres vit Valshesia et les trois autres chasseurs en train de fuir et d'esquiver les charges du Béhémoth ; avant que la femme à la lance ne brandisse en l'air un gros morceau de gros bambou aux extrémités entourées de tissu.
Elle hurla quelque chose, et immédiatement, une étincelle puis un flash lumineux explosèrent à l'extrémité supérieure du bambou. Une traînée lumineuse orange s'éleva haut dans le ciel, avant d'à nouveau exploser et de produire un halo orangé persistent et visible à des kilomètres à la ronde.
Il n'eut cependant pas l'occasion d'observer plus la scène de débâcle qui se produisait à plusieurs dizaines de mètres de là, qu'une voix d'homme s'éleva et lui fit tourner le regard vers le masque lisse où il pouvait apercevoir le reflet de son propre visage ; terrifié.
« Où se cache le Salamander ? » Dit l'homme, d'une voix déformée.
Le quoi ? Qu'est-ce que ce type lui demandait ?
La lame de l'épée continua de s'enfoncer dans sa cuirasse, commençant à la traverser pour atteindre ses vêtements et sa peau.
Géandre sentit une brûlure sur son torse, signe que l'épée entaillait sa peau, et il grimaça de douleur.
« Où est-il ? » Répéta Androanni.
Chapitre publié avec 3 heures de retard pour soucis techniques.
J'apprécie vraiment d'écrire des chapitres où les personnages bougent dans tous les sens. Il se passe beaucoup de choses, et c'est toujours l'occasion de jouer avec les points de vue.
Veuillez m’excuser de l’attente, et à dans une semaine pour la suite !
Tous les chapitres à présent dispos sur Inkitt.com !