"Je suis désolé. Tout ça c'est de ma faute. Si je ne t'avais pas montré tout ça...si j'avais pas ravivé ce conflit...rien de tout ça ne te serait arrivé. Si seulement j'était morte ce jour...si je ne m'étais pas accroché... "
C'était ce que venait de dire Alice après que Salvatoris ait été rejeté violemment de son village. Cependant, Salvatoris ne comprenait pas pourquoi elle s'excusait. Il avait été d'accord pour qu'elle viennent, il avait même déjà réfléchi au pire scénario, pourtant il avait quand même agi.
" Pourquoi t'excuser ? Tu n'as rien fait de mal tu sais. Au contraire, tu as même essayé de me rassurer...tu sais, juste avant d'entrer."
Demanda-t-il, décrochant son regard du sol pour se plonger dans les yeux Alice qui fixaient le vide. L'expression de son visage était horriblement sombre, et souffrante. Alice regarda en retour Salvatoris, essayant de contenir son expression.
" Ça reste mon idée, et ma responsabilité. Si je n'avais rien fait, tu n'aurais jamais eu ce genre de problème en premier lieu."
" Tu te trompes. Depuis tout petit je veux réanimer le héros légendaire, "Reiner". J'aurais forcément fini par essayer, et sans toi...j'aurais échoué lamentablement. J'aurais même fini mes jours dans le mensonge. Alors, si tu devais être fautive de quelque chose, ce serait de m'avoir aidé à mieux comprendre mon rêve. De m'avoir montré la vérité. "
Répondit Salvatoris, esquissant un sourire en coin alors qu'il se redressait, faisant face au paysage l'entourant. Il sortit l'une des deux cartes en peau de bête logée sous sa tunique, la montrant à Alice. Elle comportait quelques annotations, mais également le tombeau où se trouvait le corps de Reiner.
" Alors, on va chercher Reiner maintenant qu'on a fini ce que j'avais à faire ? Ou j'y vais seul."
Poursuivie t-il avec un faux sourire. Il essayait de masquer sa souffrance. Masquer cette horrible douleur qui le rongeait. Cet atroce sentiment de solitude qui lui donnait envie de s'abandonner au désespoir. Comprenant ce que faisait Salvatoris, Alice hocha la tête.
" Tu as raison, mais tu ne m'abandonneras pas aussi simplement. "
Répondit-elle en se penchant pour mieux voir la carte, repositionnant l'une de ses mèches de cheveux entravant sa vision. Maintenant qu'il y pensait, pour un synthétique n'ayant pas vu l'eau depuis des millénaires, elle sentait étrangement bon. Salvatoris secoua alors brusquement la tête, faisant pencher en réponse la tête d'Alice alors qu'il entamait une nouvelle phrase.
" Tu vois ce point au Nord Est, vraiment à la frontière avec l'empire du phénix rouge ? C'est là que se trouve le tombeau où est retenu le corps de Reiner. Nous, on est au niveau de ce petit point noir ici"
" D'accord. Donc nous, on est dans le royaume de Drack ? Il n'est pas assez puissant pour reprendre le tombeau et l'éloigner de la frontière ? Ca me paraît être important de posséder le tombeau si Reiner à été érigé en héros légendaire... "
Rétorqua Alice, intriguée par la carte sous ses yeux. Elle se gratta le menton, laissant Salvatoris lui répondre en repliant la carte.
" En fait, ce serait plutôt l'inverse. L'empire du phénix rouge est bien plus grand et puissant, mais comme notre royaume a été bâti autour d'un dragon, ils craignent qu'on le réveille et qu'il ne se mette à détruire tout le continent. Il a donc été décidé que le tombeau serait un endroit neutre... Enfin, si cette guerre ne change pas ça. "
" Ce royaume a pour fondation un dragon ?! Mais qui de sains d'esprit pourrait penser que vivre à côté de ce genre de monstre puisse être une bonne idée ? "
Salvatoris se mit à rire aux larmes, expulsant toute la pression qu'il avait pu ressentir alors qu'il essayait difficilement de reprendre sa respiration.
" Alors tu n'es pas prête pour l'empire Draconique ! Ils ont bâti l'entièreté de leur empire autour des nids de dragons. Notre Royaume continent l'un des très rares dragons n'ayant pas élue domicile là-bas. "
Les yeux d'Alice semblaient pouvoir sortir de leurs orbites à tout moment alors qu'elle fixait Salvatoris, hilare, murmurant pour elle-même.
"Les humains sont devenus encore plus fous..."
Ce petit murmure fit de nouveau ricaner le pauvre Salvatoris s'étant à peine calmé, qui expliqua quelque chose à Alice.
" Ça peut te paraître stupide de fondé un royaume proche d'une créature pouvant la détruire, mais c'est loin d'être le cas. L'empire draconique est devenu l'un des plus puissants à cause de la menace que représentent les dragons qu'il continent. Personne n'oserait attaquer l'antre d'un dragon, et encore moins un empire en contenant plusieurs. Ils se sont également spécialisés dans le domptage des créatures draconique comme des wyverne ou des drake, et les habitant de cet empire sont eux même des demi-dragon. Tout dans leur culture les relie aux dragons. C'est un peu une partie d'eux. "
Salvatoris fit une petite pause, réfléchissant en posant son index sur son menton.
"Pour nous, c'est un peu différent. Notre dragon est un peu comme un protecteur. Il a prêté main-forte aux lointains ancêtres de la famille royale, et depuis, ils assure sa tranquillité en retour. Enfin bon...je sais que ça doit paraître un peu fou."
Alice secoua la tête, comprenant en fait très bien cela. Après tout, la bombe atomique pouvait se révéler bien plus destructrice que des dragons.
[ D'ailleurs, ou sont stockées celles n'ayant jamais été utilisées ?]
Pensa-t-elle distraitement, avant de finalement répondre à Salvatoris, légèrement gêné de parler seul.
" Non, en réalité je comprends le raisonnement, c'est à double tranchant, mais très intelligent. "
Alice fit une petite pause, posant une autre question à Salvatoris en laissant son pied-droit se balancer dans les airs.
"Tu sais quand on devrait arriver à destination si on ne se fait pas retarder ?"
" On devrait arriver demain en début d'après-midi, les positions que j'ai tracées sur la carte restent très approximatives. Donc... ne traînons pas trop. A moins que tu ne veuilles faire une pause ? "
"C'est pas comme si mon corps en avait besoin."
Rétorqua Alice, esquissant un sourire. Elle se sentait légèrement mieux. En revanche, ce n'était peut-être que son imagination, mais Salvatoris lui rappelait en quelque sorte Reiner. Peut-être était-ce un effet secondaire d'avoir reçu ses souvenirs ?
Tous deux se mirent alors en route. Devant eux se profila rapidement une plaine familière, une plaine empestant la décomposition. Une plaine ornée de cadavres décomposés de routny, ainsi que de tumulus.
" Tiens, c'est ici que je t'ai trouvé. "
Déclara Salvatoris en pointant le seul tumulus ou une douce lumière fluorescente semblait s'échapper.
" Ici, dans cette plaine ?"
Demanda Alice, incrédule. Si salvatoris l'avait trouvé ici, ou était passé la capitale du dictatorial d'Arès ?!
"Oui, il y à même un second bunker avec un..."
Salvatoris fit une pause, réfléchissant sérieusement avant de retenir un ricanement de dédain, se souvenant de celui qui s'était acharné sur Alice alors qu'elle était au plus bas lors de sa première défaite, avant même que Reiner ne rejoigne le front.
"Je crois que c'est Smith qui y est enfermé. Il a totalement perdu la raison. C'est plus qu'un robot brisé."
" Alors lui aussi a survécu..."
Murmura Alice, regardant fixement la plaine. Aucune ruine ne pouvait y être vue, pas même un débris. Les ruines qu'avait trouvées Salvatoris étaient peut-être les derniers vestiges témoignant de l'existence d'une ville ici. Elle n'arrivait pas à y croire.
Tous deux continuèrent de marcher, le décor de plaine cédant du terrain petit à petit en faveur d'une forêt dont les feuilles avaient quitté les arbres, signe que l'hiver était proche, laissant Alice intriguée.
" Dit moi, pourquoi nous n'avons pas utilisé une route au lieu de s'enfoncer comme ça dans la forêt sans autre repère qu'une carte ? "
Salvatoris leva son index et son pouce, répondant d'une voix enjouée à Alice. L'idée de rompre le silence et l'ennui du trajet le mettait réellement en joie.
"C'est principalement pour deux raisons. Qui dit route, dit bandit, éviter les routes revient donc à en éviter une grande partie des gens qui n'aurait pas hésité à nous agresser pour nous détrousser, ou pire. La seconde raison, c'est les autres personnes utilisant la route. Même si nous ne faisons que nous croiser, s'ils te voyaient...j'ai peur qu'ils réagissent comme les gens de mon village, sans compter le risque de devoir passer par une ville."
" D'accord, je vois. Mais n'est-ce pas plus dangereux d'éviter les routes et risquer de croiser des monstres ? "
Salvatoris pointa la seconde carte qu'il gardait sous sa tunique, là dépliant pour y jeter un coup d'œil, comme il l'avait périodiquement fait jusqu'à présent.
" C'est là qu'entre en jeu cette carte. C'est le chef du village qui me l'avait donné avant que je t'emmène dans la vieille usine. Tous les points de danger y sont notés, enfin, une grande partie, donc on peut éviter la majorité des monstres, et en plus, nous n'avons pas à prendre les détours que la route nous aurait imposé."
Demanda Alice, sur ses gardes.
"Oui, même si on arrive à sa fin...et que le soleil commence à se coucher..."
Rétorqua Salvatoris, se tassant sur lui-même. Sa confiance en lui semblait fondre comme neige au soleil.
" Pourtant là, j'ai vu des montes à travers les feuillages... "
Déclara Alice en pointant du doigt droit devant elle.
" Vraiment, à quelle distance ?! "
" Loin, je dirais cent mètres, mais c'est dur à confirmé entre tous ces feuillages, il s'est peut-être déjà rapproché."
" A cent mètres ?! Comment tu as fait pour voir un détail aussi petit à cette distance. "
S'exclama Salvatoris en se décalant sur le côté, suivant l'exemple d'Alice qui se dirigeait dans la direction que le monstre semblait venir de quitter.
"N'oublie pas que je ne suis pas humaine."
Rétorqua Alice d'un air taquin, détendant l'atmosphère alors que les rayons orangés du soleil commençaient à se raréfier.
Quand Alice et Salvatoris furent assez éloignés du lieu où ils avaient vu un monstre, le soleil avait déjà totalement disparu. Seule l'obscurité froide de la nuit subsistait tout autour d'eux. Voir devant soi était devenu difficile, au point où Salvatoris menaçait de trébucher sur une racine à chaque pas tremblant qu'il faisait.
Maintenant qu'il y pensait, il n'avait pas réellement mangé aujourd'hui non plus... heureusement que Mélissa l'avait nourri pendant son coma, ou il aurait été dans un bien piètre état.
" Tu veux qu'on s'arrête ici ? Il se fait tard. ".
Demanda Alice, observant les alentours. Elle y voyait encore très bien, et pouvait dire avec certitude que cet endroit était calme, absent de toute trace de vie. C'en était même étrange. Ils n'avaient plus croisé le moindre monstre dans les environs, ni même un animal autre que les quelques oiseaux s'étant désormais endormis.
" Oui, tu as raison. Je m'occupe du feu."
Répondit Salvatoris, essayant tant bien que mal de retenir un bâillement.
Le froid de la nuit était mordant, et les fins linceuls que portait Salvatoris ne l'aidaient pas à s'en protéger. Si il essayait de dormir sur le sol froid, la seule chose qu'il récolterait serait la mort. Les températures chutaient drastiquement la nuit, au point où il ne serait pas étrange qu'il ne gèle une fois l'obscurité à son paroxysme. Ils avaient encore la chance que la chaleur de la journée ne se soit pas encore totalement dissipée, faisant de cet instant le moment parfait pour dresser un camp.
Alice hocha la tête en réponse, aidant tout de même Salvatoris à ramasser quelques branches sèche dispersé ci et là.
Quand les braises prirent racine dans les branchages, un petit espace fut illuminé autour d'eux, laissant Salvatoris regarder Alice. Il lui adressa une courte question, se réchauffant au coin du feu gagnant doucement en intensité.
" Tu veux te reposer un peu avant moi ? Je sais que ce n'est pas très important pour toi, mais...je ne veux pas que tu sois là seul de garde. Mes pantins peuvent amplement le faire."
Il pointa ses morts-vivants qui les suivaient inlassablement, sans bruit autre que celui de leurs armures ou vêtements décrépit.
" Non... ne t'en fais pas, ça me convient parfaitement de rester éveillé. "
Répondit Alice en secouant la tête, souriant à Salvatoris alors qu'elle s'installait avec lui au coin du feu, veillant à ce qu'il ne menace pas de s'éteindre.
"D'accord...Alors, à demain."
La conversation était maladroite, pourtant, le simple fait de ne pas être seul après tout ce temps suffisait à rendre heureuse Alice, sans même parler de leur destination. Après tout ce temps...peut-être allait-elle revoir son ami, la toute première personne qu'elle n'ait jamais connu. Du moins, c'était sans prendre en compte le malaise qu'elle ressentait due à l'anticipation.
L'obscurité rampante avait entièrement couverte le monde, ne laissant plus aucune place à la moindre lumière autre que celle du feu. Le silence était devenu roi, uniquement occasionnellement brisé par le crépitement des flammes, ainsi que les ronflements de Salvatoris. C'est à ce moment qu'Alice capta une lueur fugace s'approcher.
Ce n'était clairement pas quelque chose de naturel, au contraire. On aurait dit du feu, mais il était bien trop réduit pour que ce soit un incendie se propageant dans la forêt.
[ Que ferais des hommes ici ? Une patrouille de soldats ? ...Non impossible, il n'y a aucune route à proximité. Des brigands alors ? Mais pourquoi avanceraient-ils vers nous sans même prendre la peine de se cacher ? ]
Alors que ces questions assaillaient l'esprit d'Alice, le doute ne fut bientôt plus permis. Les silhouettes se profilant au loin étaient humanoïdes, mais clairement pas humaines. Leur apparence légèrement arquée, difforme par endroit, ne laissaient aucune place au malentendu. C'étaient des montres.
Leur apparence était semblable à celles d'un homme lézard, les écailles couvrant leur corps reptiliens élancé rappelant celui des salamandre, ou même des dragons. Leurs armes et armures étaient grossières, faites de plaque de différents aciers ayant été forgés ensemble. Cependant, la technique était indéniable.
L'armure avait été forgée avec pour objectif de protéger au mieux son porteur, et le fait qu'elle ne soit pas des plus raffiné n'était pas une faiblesse, bien au contraire. Le mixte des aciers avait donné une autre couleur plus grisâtre à l'armure, mais elle semblait bien plus lourde et résistante que celle de n'importe quelle chose de fabrication humaine. Son poids semblant indéniablement grand était peut-être la seule explication plausible au fait que les humains n'utilisent pas ce genre d'équipements. Cette apparence primitive était plutôt belle et intimidante à la fois.
Toutefois, un détail dans la démarche des trois monstres capta plus intensément l'attention d'Alice que leur équipement. Leur manière d'avancer était irrégulière, et ne correspondait en rien à l'intelligence nécessaire pour créer l'équipement qu'ils portaient. Elle était même plus semblable à celles d'un zombie, et Alice compris bientôt pourquoi.
L'odeur de sang agressa ses narines alors que les ennemis approchaient. Leur dos était ouvert en deux, et dans le creux créé à travers même la chaire se trouvait une larve de la taille d'un bras humain, se terrant dans l'homme lézard semblant être dans un état perpétuel de souffrance. Ils avaient été parasités, et leur prochaine cible était claire : l'humain plongé dans un profond sommeil au coin du feu.
Quand celui-ci se réveilla, seuls des cadavres inanimés et des larves l'attendaient, ainsi que la terreur. L'ombre d'une énorme épée primitive menaçait de lui trancher la gorge.